L'AUTRE SAINTE-HÉLÈNE
L'autre Sainte-Hélène - The other St. Helena

ARTICLES COMPLÉMENTAIRES
| Accueil | The other St. Helena | Articles |



LE MASQUE MORTUAIRE DIT "BURGHERSH"


Avant la lecture de cet article, il convient de lire au préalable l'historique du masque mortuaire de Napoléon sur ce site en cliquant ici et le chapitre "Burton" de l'ouvrage L'autre Sainte-Hélène, pp. 355-374.

Le 15 mars 1951, à Ascot en Angleterre, le baron Eugène de Veauce faisait l'acquisition d'un masque mortuaire de Napoléon lors de la vente publique organisée par sir Archibald Weigall. Il s'ensuivit une longue enquête, minutieuse, de la part du baron pour démontrer que ce masque-là était l'"archétype" qui avait servi comme modèle à la fabrication et commercialisation des masques de la souscription de 1833, et qui donc seul comprenait le masque facial original de Napoléon moulé le 7 mai 1821 par le docteur Francis Burton. Ce masque est dénommé comme  le "masque Burghersh".

Qui étaient Burghersh et Weigall ?
Lord Burghersh s'appelait John Fane, le 11ème Earl de Westmorland. Il était au poste d'ambassadeur britannique au duché de Toscane, basé à Florence, dans les années 1814-1830. Il était marié avec une nièce de Wellington, Priscilla Pole-Wellesley. Lord Burghersh mourut en 1859 et son épouse en 1879. Celle-ci, lors de son séjour en Toscane, s'était liée d'amitié avec Marie-Louise, duchesse de Parme et épouse officielle de Napoléon jusqu'en 1821. Le titre de Earl de Westmorland est passé à Francis Fane, leur fils, qui mourut en 1891. Le fils de celui-ci, Anthony Fane, connut des difficultés financières et dut vendre la maison familiale, Apethorpe Hall, en 1904, et certainement une partie des biens hérités.
John Fane, Lord Burghersh
John Fane, Lord Burghersh

La fille ainée de Lord et Lady Burguersh, Rose, s'était mariée avec l'artiste Henry Weigall le 15 août (Saint Napoléon!) 1866, en grande pompe à l'abbaye de Westminster. Lady Rose Weigall mourut en 1921 et son époux en 1925, tous deux à un âge très avancé. Leur 5ème fils, Archibald, s'était marié en 1910 avec une riche héritière, divorcée, avec qui il eut un seul enfant, une fille nommée Priscilla comme son arrière-grand-mère, la nièce de Wellington. Sir Archibald mourut le 4 juin 1952, soit une année après la vente de ses collections, et son épouse l'avait précédé au tombeau en 1950. Leur fille unique s'était mariée en 1935 avec Edward Curzon (pas de lien direct avec Lord Curzon, le collectionneur napoléonien).
Sir Archibald Weigall
sir Archibald Weigall


Quelle est la théorie du baron de Veauce ?
Le baron de Veauce exprima en détails sa théorie sur le masque Burghersh en 1957 dans son célèbre ouvrage L'affaire du masque de Napoléon. Tout d'abord il convient de situer cette théorie dans le contexte de son époque. En 1925, l'Allemand Kircheisen avait tenté de démontrer que le masque Antommarchi était issu d'un remodelage à partir de plusieurs morceaux: il croyait que le moulage négatif de la tête de Napoléon s'était brisé, par accident, et que l'on avait tenté de reconstruire le masque mortuaire, positif, tant bien que mal, mais en se trompant sur certaines proportions. C'est ce qui expliquait, selon lui, le refus des phrénologistes d'accepter pour véritable le masque Antommarchi à sa sortie en 1833.
La théorie de Kircheisen fut ensuite reprise à partir de 1951 par un autre Allemand, Stadmüller, et précisée de façon cruciale: il expliqua que seule la partie faciale du masque Antommarchi pouvait être authentique, parmi tous les morceaux qu'on avait agencés. Cette position fit quasiment autorité à l'époque. Elle offrait une lecture littérale du livre de 1825 d'Antommarchi, Les derniers moments de Napoléon, qui disait: "Je moulai la figure..." et non "Je moulai la tête..." De plus, le titre du prospectus d'Antommarchi lors de la souscription de 1833 ne disait rien d'autre, à savoir Souscription nationale pour le plâtre original du visage de l'Empereur Napoléon, donc visage et non tête. En quelque sorte, les phrénologistes avaient fait un mauvais procès à Antommarchi qui, bien qu'ayant menti sur de nombreux points, ne mentait pas sur celui-ci: seul le moule du visage était authentique. Les récriminations sur l'invraisemblance des bosses crâniennes du masque Antommarchi avaient donc été inutiles.
Phrénologie
Les bosses crâniennes, chères aux phrénologistes

Le baron de Veauce a admis cette perspective unanimement acceptée d'un masque Antommarchi en plusieurs morceaux, et ajouta que le moule négatif n'avait pas été détruit par accident mais parce qu'il était nécessaire de le détruire: il expliqua que ce fut une phase nécessaire dans la réalisation du masque par la méthode du "creux perdu", car on doit briser le négatif (d'où son adjectif de "perdu") pour extraire un masque positif qui devient ensuite l'archétype, à savoir le modèle positif à partir duquel on opère toutes les autres copies. Pour Veauce, le masque Burguersh est cet archétype.
Historia, septembre 1954
Les trois autres types de masque mortuaire de Napoléon (source baron de Veauce, article dans Historia, septembre 1954)

Quelles sont les preuves du baron de Veauce?
Il a basé sa théorie sur trois types de démonstrations. Tout d'abord, il procèda à l'élimination des autres masques mortuaires connus, à savoir les masques Arnott, Gilley, Sankey-Boys, Noverraz, ainsi que le masque du musée du RUSI (pour celui-ci, voir article complémentaire en cliquant ici). Nous reviendrons sur ces autres masques, dans de prochains articles, mais disons généralement que le baron de Veauce s'est appuyé tant sur des considérations iconographiques que sur des enquêtes historiques sur ces masques. L'archétype, selon lui, devait être de type Antommarchi, mais la question restait de savoir lequel pouvait prétendre être l'original. A force d'éliminations, il ne restait plus que le masque Burguersh, et il s'efforça de renforcer sa démontration par une seconde approche en produisant un certain nombre de "preuves historiques". Enfin, comme troisième type de preuve, le baron de Veauce fournit des attestations tendant à montrer que le masque Burghersh est bien l'archétype original.

Cet article se focalise sur ces points historiques et les attestations, mais laisse l'argument éventuel de l'iconographie à d'autres personnes mieux qualifiées. Pour connaître les preuves apportées par le baron de Veauce, que nous pourrions plutôt appeler des présomptions, cliquez sur le lien suivant.

Haut de page

Pour lire la suite, cliquez ici




Copyright © Albert Benhamou Publishing 2010-2011  - Tous droits réservés.